Le 02/11/2017 à 23:37, Larroque Joël a écrit :
Etant l'arrière-arrière-petit neveu des peintres Edouard Detaille et Charles Detaille (2nd époux d'Aline de Pommayrac sur laquelle vous avez travaillé), je viens de trouver l'acte de décès de cette dernière et me permets de vous envoyer un texte que je rédige pour archives personnelles, merci d'en accuser réception et de me donner vos réactions, cordialement Joël Larroque, herria sur Généanet

Edouard Detaille avait un autre frère cadet, Jean-Baptiste-Charles Detaille, né le 27 août 1852 à St-Germain en Laye, qui se consacra aussi à la peinture, d’abord élève d’Edouard, puis exposant dans les Salons de 1875 à 1880 en se consacrant aux scènes hippiques, de chasse comme de courses de chevaux. Il fut collaborateur des premiers journaux sportifs « Le sport » et « La vie sportive », tout en vivant de ses rentes et voyageant beaucoup, en Amérique en 1879 comme à Beaulieu-sur-Mer, dans les Alpes-Maritimes, où il devait mourir à seulement 41 ans le 14 mars 1894 (selon Emile St-Lanne, dictionnaire illustré des contemporains 1891 et Benezit 1911 et Dictionnaire de Biographie Française tome 11 de 1967 avec les erreurs le déclarant fils d’Ernest Detaille et JE Debos, mort célibataire). Le 15 mars 1894, Edouard Detaille écrivait à Jules Detaille pour lui dire « je viens de recevoir une série de dépêches m’annonçant la mort de ce pauvre Charles à Beaulieu. Il est mort subitement sans souffrance, dans une syncope chez des amis à moi, il était allé se remettre dans le midi, mais il était gravement touché, très gravement. Ma pauvre mère est dans la désolation, car elle croyait à un mieux qui n’était que factice… »

Journal Rappel n°1869 du 18 mars 1894

Voici quelques œuvres de Charles Detaille, depuis 1860, ses débuts à 8 ans , jusqu’en 1875 à 23 ans, quand il dessine

une diligence (aquarelle de 17,8 sur 24,2 cm) et un projet d’éventail (de 15 sur 56,5 cm) sur une revue militaireCharles Detaille, La revue militaire, projet davant d’acquérir une maturité de peintre dans les courses hippiques comme en 1886 (tableau de 34 sur 37 cms)Charles Detaille, Course hippiqueParmi ses œuvres : Intérieur d’écurie, Les courses de la Manche, Hallali de cerf, Rendez-vous de chasse 1880, Piquet et valet de chien 1887, Mailcoach 1892

in La vie Parisienne 1893, P.253

Gaulois du 30 mars 1893

Seulement âgé de 18 ans, Charles Detaille fréquenta, à la fin 1872, l’artiste lyrique Marie Aline de Pommayrac, de 12 ans plus âgée que lui et déjà veuve du capitaine-baron Harenc de Presle, depuis un an.

Ces jeunes tourtereaux eurent une fille Suzanne-Marthe, née à Neuilly sur Seine le 20 août 1873, enfant qu’ils reconnurent lors de leur mariage 5 ans après en 1878

Article du Gaulois du 11 décembre 1878 annonçant leur futur mariage

qui eut lieu en la mairie de Paris 9ième le 24 décembre 1878.  

L’année suivante 1879, le peintre Charles Detaille est mentionné alors avec son épouse Aline, Française de 24 ans (donc rajeunie de 15 ans comme on le verra après), comme passager en première classe sur le Canada traversant l’Atlantique du Havre à New York où il alla s’inspirer avant de revenir en France, à Paris, où il avait son atelier en l’avenue de la Grande Armée, près du bois de Boulogne et des centres hippiques qui devaient l’inspirer.

Son épouse, Aline de Pommayrac, était elle-même fille de peintre puisque son père était l’artiste-miniaturiste Paul-Emmanuel (de) Pommayrac, fils d’un François Pommayrac, né en 1775 à Givet et de Louise Pétiton 1790-1858. Paul-Emmanuel de Pommayrac naquit le 25 avril 1807 à Porto-Rico en Grande-Antille pour mourir le 10 juillet 1880 à Paris où il vint avant 1819, comme élève de Gros et de Mme de Mirbel à Paris. Auteur.

Peintre  à La Nouvelle-Orléans en 1833-35, avant de rentrer en France pour se marier en 1836 (avant un séjour à Florence en 1838) et s’installer à Paris avant 1840-50, chevalier de la Légion d’Honneur en 1852 et peintre du cabinet de l’Empereur en 1863, Pommayrac fut connu pour ses portraits de Napoléon III et de l’impératrice Eugéniecomme de la princesse Mathilde et des portraits sur ivoire d'Henri Scheffer, de Paganini et de Berlioz, de Dantan jeune, de Francis Wey, etc, et aussi de peintures mythologiques comme Nymphe désarmant l’amour Pierre Paul Emmanuel de Pommayrac, Nymphe désarmant lau salon de 1866 et La nuit au Salon de 1867.

FIGARO du 13 juillet 1880 sur la mort de Pommayrac

Selon le dossier Base Léonore de la Légion d’Honneur, l’artiste peintre Pommayrac s’était marié à Boulogne sur Mer, Pas-de-Calais, le 31 juillet 1836, avec Lucie-Hortense Mancel (née en 1815 et morte quand ?), pour en avoir deux fils, aussi chevaliers de la Légion d’honneur :

- Pierre-Alfred de Pommayrac, né le 6 décembre 1838 à Florence qui commença sa carrière militaire dans les armées de Napoléon III comme spahi dès 1857, capitaine de cavalerie en Cochinchine en 1880 puis lieutenant-colonel et colonel au 5ème régiment des chasseurs d’Afrique, chevalier de la LH le 3 août 1875, officier le 29 décembre 1891 et commandeur le 11 juillet 1898, marié le jeudi 19 juin 1884 à Paris 8ème avec Léonie RODIER (1848-morte après 1917), mort le 12 octobre 1917 en son domicile du 17, rue Chevert à Paris 7ème

-Jean-(Pierre) Louis-Camille de Pommayrac, né le 7 juin 1850 au 51, rue St-Lazare de Paris 9ème, engagé volontaire en 1870 avant de faire carrière diplomatique en tant que licencié en droit, administrateur des affaires indigènes en Cochinchine en 1874 jusqu’à être consul de France au Brésil en 1904 puis à Rosario d’Argentine quand il est fait chevalier de la LH le 30 décembre 1906, décoré en 1908, habitant au 7 rue Pierre le grand de Paris, mort en décembre 1908 au tremblement de terre de Messine en Italie  

-et, entre les deux, le 10 septembre 1840 à Paris 2nd, naissance de la future artiste lyrique Marie-Aline de Pommayrac qui, alors qu’elle vivait avec ses parents au 51 rue St-Lazare de Paris 9ème, y épousa le mercredi 14 octobre 1863 Ernest-Auguste Harenc, baron de Presle, Selon le site www.hussards photos.com/France/France_CDV_6_dePresle.htm et le dossier Base Léonore de la Légion d’Honneur

cet Harenc de Presle (selon photo de 1860 à Milan) était né le 7 août 1825 à Paris 1er, logeant en 1863 en la rue de La Cerisaie de Paris 4ème, s’étant engagé volontaire au 4ème chasseurs dès le 7 février 1845, corps qu’il rejoignit le 18, suivant les cours de l’Ecole de cavalerie de Saumur comme élève le 6 novembre 1845, cavalier de première classe le 17 mai 1846 puis brigadier le 30 octobre, maréchal des logis au 1er escadron des Guides le 1er mai 1848 puis au 4ème chasseurs le 18 décembre 1850, sous-lieutenant du 6ème hussards le 1er mai 1854, lieutenant le 24 mars 1858, malgré ses frasques de viveur puisque le général Reyan déclarait de lui en 1858 : "Officier ne manquant pas de mérite sous les rapports militaires ; ayant peu d'ordre, il avait contracté des dettes dont il a payé une grande partie."

Harenc de Presle participe avec son régiment à la Campagne d'Italie, du 9 Mai 1859.
Le Régiment mobilise quatre Escadrons de Guerre (1er, 2nd, 3e et 6e) ; Harenc de Presle est alors Lieutenant en Second au 2e Escadron du régiment (Capitaine LEGOUPIL).
Le régiment est à Tortoni le 17 mai ; le 2e Escadron sera détaché auprès du Général Bourbaki - avant de rejoindre à Mori, le 25 Mai. Le régiment, qui forme avec le 8e la Brigade Lapeyrouse, se rendra à Gênes, Livourne, Florence, avant de marcher vers le Nord-Ouest pour menacer les arrières des armées Autrichiennes. Ce rôle stratégique empêchera toutefois le Corps de participer activement aux épisodes de la guerre.
Le régiment sera stationné à Milan de fin Juillet 1859 à Mai 1860. Sûrement l'occasion de cette notation par son Brigadier :
1859- "Serait un bon officier s'il était moins léger. Enclin à faire des dettes." (Général de LAPEYROUSE) 

De Presle se verra remettre la Médaille Commémorative de la Campagne d'Italie, qu'il arbore sur ces portraits faits à Milan début 1860. avant qu’il ne rentre d'Italie le 13 Juin 1860. Il passa alors dans la Garde de Paris le 20 Octobre 1860. Le 5 Septembre 1863, il devient Lieutenant à l'Escadron de Gendarmerie de la Garde Impériale, un mois avant son mariage du 14 octobre avec la belle Aline de Pommayrac. Fait Chevalier de la Légion d'honneur le 19 Mars 1864. Le mois suivant, l'Escadron de Gendarmerie de la Garde se voit transformé en Escadron de Gendarmerie d'Elite et Harenc de Presle passa Capitaine, très certainement courant 1866.
Il rentra dans la Garde de Paris, dans laquelle il se trouvait lorsque, le 6 juin 1867, au cours de l'Exposition Universelle, un attentat visera le Tsar Alexandre II - comme relaté par le Capitaine Lubet, commandant de la 4e Compagnie du 2e Bataillon de la Garde de Paris :
"Lors de la cérémonie en l'honneur de S.M. l'Empereur de Russie... certifions : qu'au moment de l'attentat qui a eu lieu contre ce souverain , M. le capitaine de Presle s'est précipité sur l'assassin Berezowski qui était déjà entre les mains de M. le capitaine Lubet, a lutté avec lui pendant 20 à 25 minutes, contre une foule furieuse ; qu'il a été presque étouffé ; qu'à bout de forces, il a été contraint de lâcher l'assassin, qu'il ne put reprendre qu'ensuite, pour le conduire à la préfecture de Police et qu'à la suite des faits ci-dessus, il s'est déclaré chez M. le capitaine de Presle une maladie d'épuisement.."

Hélas, Harenc de Presle ne se remit jamais de ces événements et fut admis à faire valoir ses droits à la retraite à titre d'infirmité le 21 Octobre 1869. Retraité le 9 Mars 1870 pour cause d’aliénation mentale, il fut interné à la maison de Charenton peu avant de mourir à St-Maurice sur Seine le 6 janvier 1871.

Du mariage Harenc de Presle et Pommayrac de 1863, naquirent en leur demeure du 8 rue St-Paul de Paris 4ème, Marthe-Clémence-Germaine Harenc de Presle, le mardi 14 janvier 1868  hélas ! morte à 9 mois le 8 octobre 1868 en leur domicile du 8 rue St-Paul

et, selon site Généanet-Ghislain de Beauregard, une Juliette HARENC de PRESLES ?

Quant à la veuve, Aline « comtesse de Presle » elle devait devenir, comme Valtesse de La Bigne, une des célèbres courtisanes du Second Empire finissant et de la toute nouvelle IIIème République, tout en se consacrant à la musique sous le nom d’artiste de Prelly (telle que photographiée par LiebertRésultat de recherche d'images pour "juliette
              PRELLY"puis en janvier 1901 par Nadar sous le nom de Mme Prelly

http://www.culture.gouv.fr/Wave/image/memoire/0125/sap01_na23816537n_t.jpgcomme le rappelle le dictionnaire des pseudonymes (édition E. Dentu, 1887), de Georges d'Heylli alias Edmond Antoine Poinsot (1833-1902)],

et cette biographie

(ou il y a erreur, ce n’est pas le père mais le frère cadet du célèbre peintre Detaille que Melle de Pommayrac épousait en secondes noces).

Aline Prelly débuta comme mezzo-soprano en interprétant le rôle de Djamileh (inspiré de Mamouna de Musset en 1832 et repris dans l’opéra comique en un acte de Bizet en mai 1872, comme elle est citée in LA RENAISSANCE LITTÉRAIRE ET ARTISTIQUE du 16 novembre 1872, p. 238 : Espérons que le succès de dimanche dernier engagera l’Opéra Comique à nous rendre Djamileh, interprétée comme elle mérite de l’être. Les yeux, les bras et les cheveux noirs de Mme Prelly étaient merveilleux; mais pour chanter de pareille musique, une belle voix et un grand talent sont indispensables. On peut dire que Djamileh n’a pas encore été entendue.

Aline Prelly interpréta ensuite plusieurs autres rôles d’Opera-Comique, aux Bouffes et aux Folies-Dramatiques, avant qu’âgée de la trentaine, elle fréquenta le jeune Charles Detaille, 18 à 19 ans, lui donnant une fille à Neuilly en 1873 avant qu’elle ne l’épouse la veille de Noël 1878. De nouveau veuve à Beaulieu-sur-Mer le 14 mars 1894, la « comtesse de Presle » devait devenir une des premières femmes ayant le permis de conduire et une automobile. Pour combattre la déshydratation que provoquait la grande vitesse en l’absence de pare-brise de son véhicule, elle obtint de son ami le chimiste, académicien et homme politique, Marcellin Berthelot (1827-1907) qu’il lui invente un Baume Automobile dont la vente lui donna tant de bénéfices qu’elle lança en 1905 la chaîne de parfumerie du 10 rue St-Lazare à Paris IX (rue où elle vivait avec ses parents et frères en 1850), la Maison Detaille, profitant du nom et de la renommée des célèbres peintres (ayant, plus de 110 ans après, des succursales jusqu’en Hollande et Japon)

Selon le site http://www.detaille.com/index.php?id_cms=6&controller=cms&id_lang=4

Detaille fondée en 1905 par  Prelly (Aline de Presles, dite), maîtresse de l'Empereur Napoléon ...

C’était en cette même année 1905 qu’elle devait mourir, quelques mois après, à l’âge de 64 ans selon son acte de décès du 10 août 1905 à 1 heure 30 en l’hôpital de la Santé-mairie du 13ème, retranscrit les 29 août-6 septembre 1905 en la mairie du 17ème arrondissement   où elle avait son domicile : Marie-Aline de Presle née de Pommayrac et veuve Detaille, était déclarée rentière au 54, de l’avenue de Wagram-Paris-17ème.

 

Quant à la fille légitimée en 1878 de Charles Detaille et d’Aline de Pommayrac, Suzanne-Marthe Detaille, née à Neuilly en 1873, elle devait reprendre les deux professions successives de sa mère, d’abord celle d’artiste selon la Gazette anecdotique du 15 juin 1890 p.335

Puis, celle de parfumeuse en prenant, après la mort de sa mère en 1905, la succession de la Maison Detaille, selon informations Wikipédia sur Detaille (maison de parfum)

Épouse de Jean-Baptiste-Charles Detaille (1852-1894), le frère du célèbre peintre Édouard Detaille, la « comtesse de Presles » fut d’abord connue sous le pseudonyme "Madame Prelly", en chantant l'opérette, puis à l'opéra comique (création de la Djamileh de Bizet en 1872), et enfin aux Folies dramatiques et Bouffes ; toutes les critiques ne sont pas unanimes. Elle était l'une des figures de l'élégance à la Belle Époque, férue d'automobile et première femme à en conduire une, qui demanda au chimiste Marcellin Berthelot de concevoir pour elle un lait hydratant pour le visage : le « Baume Automobile » (un mélange d'oxyde de zinc et de protéines de blé) devient célèbre et est lancé en 1905 par la comtesse et sa fille Suzanne Detaille. Il est le premier produit conçu par la Maison Detaille, qui ouvre boutique à Paris, rue Saint-Lazare, Paris 9ème.

L’ex-Mademoiselle Juliette Prelly aurait-elle été la baronne de Presle mentionnée dans le faire-part de décès de son oncle Henri Detaille en 1943 ?

 

Parmi les clients célèbres, le maréchal Lyautey qui fait fabriquer une eau de toilette adaptée à sa peau, mais aussi les reines Astrid de Belgique et Marie de Yougoslavie dont les archives de la maison portent trace de commandes : la gamme s'enrichit dans les années 1920 et 1930 de nombreuses fragrances et de crèmes de soin. La maison Detaille est l'une des dernières en France, avec Caron, à fabriquer de la véritable poudre de riz. Le parfum « Aéroplane » (1927), créé en hommage à Charles Lindbergh.

Références

« Le baume magique de la comtesse » cite Marie-Aline de Pommayrac (10 septembre 1840 – 10 août 1905), fille du peintre Pierre-Paul-Emmanuel de Pommayrac (1807-1880), épouse du capitaine Ernest-Auguste Harenc de Presles (1825-1871), qui prend le pseudonyme de Madame Prelly puis épouse en 1878 Charles Detaille, et se fait connaître sous le nom de Comtesse de Presles (in archive, Caradisiac, en ligne).

 « Detaille, le parfumeur centenaire [archive] », in  Le Daily Neuvième, en ligne.

Élisabeth de Feydeau, Les Parfums : Histoire, Anthologie, Dictionnaire, Robert Laffont, 2011, 1206 p. (ISBN 2221110072)

Detaille et le parfum Flacons de parfum DetailleUne histoire qui dure depuis 1905