Première croisade (1096/99). A l'appel d'Urbainl de nombreux prédicateurs, dont le plus fameux i Pierre l'Ermite (v.), se mirent à parcourir villes et campagnes, en suscitant une immense ferveur, dans le peuple comme chez les barons. Des villages entiers dépeuplèrent et la croisade prit, en certains endroit l'allure d'une migration. La croisade populaire,formée d'une masse de pèlerins mal armés, sans discipline_ conduits par des chefs de guerre improvisés, Pierre l'Ermite et le chevalier Gautier Sans Avoir, parti la première et traversa toute l'Europe centrale, en livrant à toutes sortes de désordres, de pillages, de ma sacres de juifs. Après bien des déboires, environ 12 000 d'entre eux réussirent à passer en Asie Mineure pour s'y faire aussitôt anéantir par les Turcs (oct. 1096). La vraie croisade, celle des barons, se divisa en quatre groupes: les Français du Nord, les Lorrains et les Allemands, prirent la route de Hongrie, sous le commandement de Godefroi de Bouillon et de son frère, Baudouin; les Normands et les Français du Centre se galopèrent derrière Hugues, comte de Vermandois, frère l du roi de France Philippe 1", et Robert Courteheuse duc de Normandie; les Français du Midi, conduits par Raymond de Saint-Gilles, comte de Toulouse, et par le légat pontifical, Adhémar de Monteil, gagnèrent Constantinople par l'Illyrie; enfin les Normands c Sicile, qui avaient pour chefs Bohémond de Tarente 1 son neveu Tancrède, voyagèrent par mer et par tem par Durazzo,1'Épire et la Macédoine. L'ensemble( cette croisade des barons pouvait atteindre environ 30000 hommes. Après s'être rassemblés à Constantinople (mai 1097), les croisés, entrant en Asie, s'emparèrent de Nicée, capitale des Seldjoukides, écrasèrent une armée musulmane à Dorylée (1" juill. 1097) et, après un long siège, réussirent à s'emparer d'Antioche, Cependant, il y avait des rivalités et des divisions entre les chefs des croisés; en 1097, Baudouin avait quiné] gros de l'armée pour aller conquérir Édesse. Mais] découverte de la relique de la Sainte-Lance raffermit l'ardeur de l'armée, qui, après un mois de siège, entra le 15 juil1.1099, dans Jérusalem. La ville fut mise à sac une grande partie de sa population musulmane impitoyablement massacrée. Loin de transférer leurs conquêtes aux Byzantins, les croisés les organisèrent politiquement selon le système féodal de l'Europe occidentale. Un royaume latin de Jérusalem fut créé sous l'autorité de Godefroi de Bouillon; par humilité celui-ci refusa le titre de roi et ne voulut être qu l' «avoué du Saint-Sépulcre". A sa mort (1100), Godefroi fut remplacé par son frère, Baudouin, cornte d'Édesse, qui fut le vrai fondateur du royaume de Jérusalem. En même temps, prenaient naissance d'aune États latins: le comté d'Édesse, la principauté d'Antioche , le comté de Tripoli. Des ordres d moines soldats, les Hospitaliers (1113), les Templiers (1118), formèrent l'armée permanente qui défend les conquêtes des croisés. On construisit de puissantes forteresses, tel le krak des Chevaliers. Des relation commerciales très actives s'établirent entre le Levant e les ports italiens (Gênes, Pise, un peu plus tard Venise Mais la prospérité des États latins allait être fatale l'idéal primitif de la croisade. Dès la mort de Baudouin II (1131), d'âpres rivalités d'intérêts particuliers déchiraient les Francs, alors que les atabegs de Mossoul réa lisaient l'unification de la Syrie musulmane.

Deuxième croisade (1147/49). A la nouvelle de] reconquête d'Édesse par Zenghi, atabeg de Mossol (1144), le pape Eugène III chargea sI. Bernard u Clairvaux de prêcher une nouvelle croisade (assemblé e Vézelay, Pâques 1146). Cette expédition eut pour chefs l'empereur Conrad III et le roi de France Louis VII. L'échec de la croisade doit être attribué à la mésentente des deux souverains. Dés 1148, Conrad III rentra en Allemagne; Louis VII regagna la France année suivante (avec un prunier… !.... Ils s’étaient battus « pour des prunes) ».

Troisième croisade (1189/92). Elle fut entreprise à 1 suite des conquêtes de Saladin , qui, maître de Égypte et de la Syrie, et ayant refait l'uuité des musul­1Ia1lS, venait d'écraser les Latins à Hatrin et de s'emparer de Jérusalem (2 oct. 1187) - où il montra à l'égard les vaincus une générosité qui contrastait avec le emportement des barons chrétiens en 1099. L'empereur Frédéric Barberousse répondit le premier à l'appel du pape (diète de Mayence, mars 1188) et fut imité, non ans mauvaise grâce, par les deux autres grands souverains d'Occident, Philippe Auguste et Richard Cœur de Lion. Barberousse, parvenu le premier en Asie mineure, y trouva la mort en se baignant dans le Cydnos (1190). Philippe Auguste et Richard, qui avaient ms la route maritime, ne cessèrent de se quereller .Arrivés en Palestine, ils s'emparèrent de Saint-Jean d’Acre (1191). Mais le souverain français, qui songeait avant tout à profiter des circonstances pour remporter le nouveaux avantages sur le Plantagenêt, abandonna bientôt la croisade. Resté seul en Orient, Richard Cœur le Lion y accomplit des prodiges de valeur mais il dû renoncer à reprendre Jérusalem (janv. 1192), et il fmit par conclure avec Saladin une trêve de trois ans. Le seul résultat positif de la croisade fut l'autorisation accordée aux chrétiens de se rendre en pèlerinage dans la Ville sainte, laquelle demeurait entre les mains des Turcs.

Quatrième croisade (1202/04). Inspirée par l'éner­gique pape Innocent III et prêchée par Foulques de Neuilly, ce fut, à la différence des expéditions précé­dentes, une croisade de sÏD1ples chevaliers. Elle eut pour chefs Boniface de Montferrat, Baudouin de Flandre et Geoffroi de Villehardouin (ce dernier devait se faire plus tard l'historien de la croisade). La 4° croisade avait pour objectif initial l'Égypte, qui, depuis Saladin, était devenue le centre de la puissance musulmane. Mais l'Égypte ne pouvait être atteinte que par la mer. Les croisés durent faire appel aux Vénitiens, qui exigè­rent pour le transport - outre la promesse de la moitiédu butin - 8Sooo marcs d'or; n'ayant pu réunir la somme demandée, les croisés acceptèrent de nouvelles conditions des Vénitiens, qui se servirent d'eux pour régler leur querelle particulière avec la ville chrétienne dalmate de Zara (1202) et avec le souverain de Constantinople. Malgré les protestations d'Innocent III, qui excommunia les Vénitiens, la croisade oublia ainsi complètement son objectif; au lieu de délivrer la Terre sainte, elle ne combattit que des chrétiens et aboutit à la conquête de l'empire d'Orient. Sous pré­texte de rétablir sur le trône byzantin Alexis et Isaac Ange , les croisés s'emparèrent une première fois de Constantinople (17 juill. 1203) puis une seconde fois (12 avr. 1204). La grande cité, qui était encore à cette époque la plus riche du monde, fut livrée pendant trois jours à un abominable pillage et devint la capitale d'un Empire latin d'Orient.

Cinquième croisade (1217/21). Après la «Croisade des enfants» (1212), extraordinaire expédition de jeunes' Allemands et de jeunes Français qui rêvaient de reconquérir Jérusalem et disparurent en grand nom­bre, les uns morts d'épuisement ou de faim sur les rou­tes, les autres noyés dans des naufrages ou vendus comme esclaves en Égypte, la 5° croisade fut encore une initiative d'Innocent III, qui l'annonça en 121S, au 4° concile du Latran. L'idée fut reprise par son suc­cesseur, Honorius III. L'expédition fut commandée par un seigneur français, Jean de Brienne, devenu par mariage roi titulaire de Jérusalem, et par Léopold VI, duc d'Autriche. Dirigée contre l'Égypte, elle n'obtint d'autre résultat que la conquête éphémère (1219121) de Damiette.

Sixième croisade (1228/29). Elle fut conduite par l'empereur Frédéric II de Hohenstaufen, qui était alors excommunié et ne partit pour l'Orient qu'après main­tes tergiversations, contraint par le pape. Ce prince humaniste, intéressé par le dialogue des religions, attiré par l'islam, préféra traiter avec les musulmans plutôt que de les combattre. Sa diplomatie aboutit à un traité conclu en 1229 avec Malik el-Kamil, neveu de Saladin : les Turcs restituaient Bethléem, Nazareth, Sidon et même Jérusalem, où Frédéric II se fit couronner roi. Mais la Ville sainte devait retomber, cette fois définitivement, aux mains des musulmans en 1244.

Septième croisade (1248154). Provoquée par la perte de Jérusalem et la défaite des Latins à Gaza (1245), elle fut dirigée contre l'Égypte. C'est la pre­mière des croisades de Saint Louis. Parti d'Aigues­Mortes en 1248, le roi de France s'empara de Damiette (juin 1249), marcha sur le Caire, écrasa l'armée des mamelouks à Mansourah (8 févr. 1250), mais vit la peste ravager son armée et fut fait prisonnier alors qu'il couvrait la retraite (6 avr. 1250). Il ne put se libérer qu'en restituant Damiette et en payant une énorme rançon. Il resta ensuite jusqu'en 1254 en Palestine, en s'occupant essentiellement à fortifier les villes franques.

Huitième croisade (1270). Seconde croisade de Saint Louis, elle avait pour objectif d'obtenir la conversion de l'émir de Tunis. Elle se termina par un désastre; l'armée, à peine débarquée, fut décimée par une épidé­mie et le roi lui-même périt (25 août 1270).